Article : Ligature élastique des hémorroïdes internes | Proktos
Article : Ligature élastique des hémorroïdes internes
Article : Ligature élastique des hémorroïdes internes
Par Pr. Laurent SIPROUDHISPréambule
Les hémorroïdes internes sont des éléments normalement présents à l'intérieur de l'anus. Elles sont constituées de lacs sanguins enveloppés par un revêtement et fixés à la paroi musculaire profonde par un système naturel d'amarrage. Elles forment ainsi des coussinets qui pourraient jouer un peu le rôle de "joints d'étanchéité" de l'anus.
Dans certaines situations favorisantes telles que les troubles du transit intestinal (diarrhée, constipation), le tissu de soutien se fragilise et les hémorroïdes internes peuvent être soumises à des facteurs traumatiques importants induits par une variation de leur position habituelle.
Le but des traitements réalisés lors de la consultation (traitements dits "instrumentaux") est de renforcer le tissu de soutien des hémorroïdes par la création d'une petite cicatrice au sommet des hémorroïdes. Cette cicatrice peut être obtenue par brûlure (chimique, coagulation électrique, infrarouge ou autre).
Principe
La ligature élastique poursuit le même objectif que les autres traitements instrumentaux de la maladie hémorroïdaire : celui de créer une cicatrice renforçant le tissu de soutien au sommet des hémorroïdes. Dans cette technique, le moyen d'y parvenir est original parce qu'il consiste à emprisonner une zone superficielle de la paroi et à y positionner un anneau élastique afin d'entraîner l'étranglement puis la destruction du tissu emprisonné (figure 1).
Figure 1 : Zone interne de l'anus où est réalisée la ligature élastique.
L'anneau élastique va emprisonner une ou plusieurs petites zones de revêtement en réalisant une sorte de "champignon".
Lorsqu'il a fait son office, l'anneau élastique est spontanément éliminé et il laisse à sa place une plaie de petite taille dont la cicatrisation sera acquise en une à deux semaines (figure 2).
Figure 2 : Aspect de la zone de revêtement immédiatement après la ligature et après que l'anneau élastique ait été éliminé.
Cette double étape (emprisonnement, destruction) contribue à renforcer le tissu de soutien des hémorroïdes internes.
Mode de réalisation
Cette méthode est effectuée pendant la consultation parce que la zone sur laquelle porte le traitement (partie haute de l'anus) n'a pas la même sensibilité que la peau : elle n'est pas sensible aux plaies et aux brûlures mais plutôt à la pression. Une ou plusieurs ligatures peuvent être posées pendant la même séance.
Le traitement lui-même ne prend que quelques instants : il est effectué à travers le conduit d'un anuscope en utilisant un appareil décontaminé et/ou à usage unique (figure 3).
Figure 3 : Type d’instrument utilisé pour la réalisation d’une ligature élastique (ligateur).
L’anneau élastique est positionné au moyen d’un cône sur le cylindre interne de l’appareil
et c’est la mobilisation du cylindre externe qui libère l’anneau élastique.
Certains praticiens associent parfois une congélation du tissu emprisonné à l'occasion de la même séance. Il est fréquent mais non obligatoire de proposer un traitement antibiotique avant ou au moment du geste et des calmants de la douleur éventuelle (antalgiques) après sa réalisation. Cette méthode peut être répétée, si besoin, lors de deux ou trois consultations mensuelles consécutives. Cette technique ne doit pas être effectuée chez les personnes qui ont des problèmes de coagulation et notamment après prise d'aspirine ou de médicaments anticoagulants.
Risques
Cette technique expose néanmoins à des effets indésirables qu'il convient de connaître. La perception d'une gêne ou d'une sensation de corps étranger ou encore d'une envie pénible de déféquer peut apparaître après le geste et persister pendant quelques heures.
Il est également assez fréquent que de petits saignements soient observés au moment ou au décours de la selle dans les jours qui suivent la réalisation du geste.
Ces éléments ne doivent pas inquiéter. Néanmoins, pour ces raisons de tolérance parfois mauvaise, certains praticiens ont une réticence à proposer ce type de traitement instrumental en première intention.
En revanche, certaines complications peuvent survenir qui doivent alarmer : un saignement abondant (aller à la selle pour ne faire que du sang), de la fièvre, des douleurs importantes ou l'impossibilité d'uriner sont des signes qui invitent à reprendre contact avec son médecin dans les plus brefs délais.
Il arrive parfois qu'un malaise survienne dans l'heure qui suit la réalisation du geste : il est le plus souvent lié à un ralentissement transitoire du cœur (malaise vagal).
Ces effets indésirables et complications sont d'autant plus fréquents que le nombre de gestes effectués pendant la même séance est élevé. Pour ses raisons, il est prudent d'être accompagné le jour de la réalisation du geste et il convient d'éviter un éloignement ou un voyage important dans les jours qui suivent.
Efficacité
La technique de ligature élastique est la plus efficace des méthodes instrumentales actuellement proposées.
L'amélioration des signes liés aux hémorroïdes est observée habituellement plus rapidement qu'avec les autres méthodes.
Ce bénéfice s'observe souvent au prix d'effets indésirables un peu plus nombreux que les autres techniques instrumentales (sclérose, infrarouge).
Certaines équipes médicales ont même comparé les résultats de cette technique à ceux de la chirurgie des hémorroïdes. D'une façon générale, deux tiers des personnes traitées voient leurs principales plaintes hémorroïdaires disparaître après ce traitement.
Comme toutes les méthodes instrumentales, l'effet du traitement se dégrade avec le temps c'est-à-dire que plus le recul est important après le traitement, plus la proportion de personnes qui voient leurs signes hémorroïdaires réapparaître est élevée.
D'un autre point de vue, le traitement par ligature est habituellement moins efficace lorsque les personnes ont des signes en rapport avec de volumineuses hémorroïdes internes que lorsqu'ils sont en rapport avec de plus petites hémorroïdes.
De ces faits, il est difficile de proposer systématiquement ce type de traitement chez tous les malades qui souffrent des hémorroïdes. La décision du traitement dépend donc de nombreux facteurs au premier plan duquel figure le choix de la personne qui s'en plaint.
Pour en savoir plus
- La ligature élastique : informations dispensées par la société nationale française de colo proctologie. (http://www.snfcp.org/)
- MacRae HM, McLeod RS. Comparison of hemorrhoidal treatment modalities. A meta-analysis.Dis Colon Rectum. 1995;38:687-94.
- Murie JA, Mackenzie I, Sim AJ. Comparison of rubber band ligation and haemorrhoidectomy for second- and third-degree haemorrhoids: a prospective clinical trial. Br J Surg. 1980;67:786-8.
- Peng BC, Jayne DG, Ho YH. Randomized trial of rubber band ligation vs. stapled hemorrhoidectomy for prolapsed piles. Dis Colon Rectum. 2003;46:291-7.
- Poen AC, Felt-Bersma RJ, Cuesta MA, Deville W, Meuwissen SG. A randomized controlled trial of rubber band ligation versus infra-red coagulation in the treatment of internal haemorrhoids. Eur J Gastroenterol Hepatol. 2000;12:535-9.